L'avion spatial secret de la Chine est retourné sur Terre
Étant demeuré neuf mois en orbite, le prototype d’avion spatial que la Chine avait lancé une première fois en 2020 vient de rejoindre la terre ferme. La CASC (China Aerospace Science and Technology Corporation), l’acteur étatique majeur du secteur national, a confirmé son atterrissage le 8 mai heure de Pékin au terme d’une mission de 276 jours, sa deuxième en orbite, aussi secrète que le vaisseau dont elle relève. Dans le cadre d’un programme spatial chinois quasi-opaque et de l’intérêt de celui-ci à développer des moyens de réutilisation, cet évènement revêtirait une importance certaine.
L’avion spatial chinois, également appelé CSSHQ (pour 可重复使用试验航天器 ou chóngfù shǐyòng shìyàn hángtiān qì en mandarin) est un véhicule employé par la Chine à des fins vraisemblablement militaires. Ses caractéristiques demeurant inconnues, seules une poignée de vues d’artistes et de spéculations nous renseignent à son sujet. Il s’avérerait par son apparence très similaire au X-37B de Boeing, une navette expérimentale opérée par l’armée américaine qui l’aura fait volé six fois et 908 jours dans le cadre de sa dernière mission, et des experts occidentaux n’hésitent pas à le qualifier de copie conforme ; les deux serviraient néanmoins à un usage de démonstration technologique. L’avion performa une première mission de deux jours en septembre 2020.
Le 5 août 2022, une fusée CZ-2F/T (CZ correspondant à Chang Zheng ou Longue Marche en français) s’élançait vers 16:00 UTC du pas de tir SLS-2 du centre de Jiuquan, au cœur du désert de Gobi. Disposant d’une plus grande coiffe comparativement à l’itération G destinée aux vols habités de CZ-2F, elle envoya le vaisseau vers une orbite initiale de 393×596 km d’altitude et inclinée à 50°, avant que l’objet ne la circularise à 597×608 km en octobre. La mission du CSSHQ auraient inclus de nombreuses manoeuvres orbitales, ainsi que des opérations d’amarrage et de vol simultané avec un objet subsatellitaire à plusieurs reprises.
Des images de la coiffe du lanceur CZ-2F ayant envoyé le vaisseau dans l’espace, diffusées à la suite de son lancement énigmatique, ont conforté cette idée, suggérant sa similarité au X-37B mais aussi ses dimensions approximatives. D’une masse estimée à près de 8 tonnes, limitée par la capacité d’emport de la fusée, l’avion disposerait d’une envergure supérieure à 4,2 mètres, le diamètre de la coiffe possiblement compensée par les bosses externes. En constatant leur disposition, on se rend de même compte que le vaisseau américain pourrait exactement s’y loger, notamment pour un espace de ~2,7 mètres entre ses ailes et ses ailerons arrières.
L’existence du CSSHQ s’inscrit dans la continuité de celle du vaisseau robotique Shenlong, à propos duquel peu d’informations sont disponibles si ce n’est quelques rares images. Ce prototype aérodynamique quasi-identique visuellement au X-37B, du fait de sa section motorisée ou de son bouclier thermique s’étendant sur le nez de l’appareil, aura effectué entre autres tests un vol suborbital en janvier 2011.
L’agence de presse Xinhua évoqua dans une annonce un retour du CSSHQ au centre spatial de Jiuquan, sauf que les informations relatives à cela concorderaient vers un atterrissage horizontal à la base de Lop Nur, dans la province du Xinjiang, vers 0:20 UTC le 8 mai. Grâce à des photographies satellitaires fournies par la société Umbra Space, cette piste fut explorée plus en détails et il semblerait que l’avion s’y soit effectivement posé. Todd Master, un officiel de l’entreprise, a partagé ces clichés sur Twitter, notamment celui pris trois heures après l’atterrissage supposé de l’appareil sur lequel on distingue un groupement d’objets sur la piste, peut-être un convoi de récupération du véhicule spatial. Ce dernier aurait de même été repéré à l’extrémité nord-est de la piste, à un endroit plausible où il se trouvait déjà en 2020.
Selon les autorités chinoises, ce vol confidentiel représenterait une percée technologique en matière de réutilisation spatiale, ce dans une optique d’utilisation pacifique dans l’espace. Etant donné la rivalité croissante avec les Etats-Unis et la militarisation graduelle de l’orbite terrestre, il n’est pas à exclure que cet avion spatial soit assigné à des fins de recherche militaires, relative à des armes spatiales que la nature cachée de sa mission ne peut élucider.